L’axe intestin-thyroïde, la connexion oubliée
Il existe de plus en plus de preuves de la présence d'un important axe intestin-thyroïde, et à quel point les changements dans l’alimentation et l’hygiène de vie ont une influence positive. Un microbiote intestinal sain a non seulement des effets bénéfiques sur l'activité du système immunitaire, mais aussi sur la fonction thyroïdienne. Les maladies thyroïdiennes et intestinales coexistent très souvent : la thyroïdite de Hashimoto et la maladie de Basedow sont les plus courantes. Ces maladies auto-immunes de la thyroïde ont été depuis longtemps liées à la maladie cœliaque et à la sensibilité au gluten non cœliaque (SGNC). C’est pourquoi l’éviction du gluten permet à la plupart des personnes atteintes de ces maladies d’obtenir rapidement des effets positifs sur leurs symptômes. Si la paroi de l’intestin devient poreuse (endommagée, inflammée), alors certaines molécules antigéniques peuvent passer dans l’organisme, alors qu’elles ne le devraient pas, et vont déclencher une réaction du système immunitaire. Et concernant la composition du microbiote, abrité majoritairement par notre gros intestin, il a la capacité d’influencer la disponibilité des micronutriments que nous consommons et qui sont essentiels à la fonction thyroïdienne (zinc, sélénium, fer…). Ces éléments-là font souvent défaut à la personne atteinte d’un problème de thyroïde, mais également pour la fonction immunitaire qui est pourtant si importante dans le cadre des maladies auto-immunes. Voyons de façon détaillée ces enjeux.
Qu’est-ce que le Microbiote ?
La nécessité d’un microbiote sain
Notre corps abrite une multitude de microorganismes présents à différents endroits, mais c’est au niveau du côlon qu’est concentrée la majorité du microbiote. Cet écosystème comprend des bactéries, virus, parasites et champignons dans un équilibre fragile. Parmi les souches bactériennes, les Firmicutes et Bacteroides sont majoritaires. Bien entendu, énormément de facteurs influencent la composition : alimentation, environnement, médicaments, stress et sommeil, naissance par césarienne, allaitement ou non, génétique etc.
Un microbiote sain nous permet d’être en bonne santé, en particulier parce que 70 % de notre système immunitaire se trouve au niveau de l’intestin. Notre flore fabrique aussi pour nous certaines vitamines comme les vitamines du groupe B ou la K, ainsi que d’autres molécules telles que le butyrate. Ce dernier est la « nourriture » des cellules du côlon (pour un bon transit intestinal) mais il posséderait également des bénéfices pour la fonction immunitaire. La production de butyrate est favorisée par les fibres alimentaires mais est aussi disponible directement dans certains aliments comme les produits laitiers.
Les probiotiques
Un probiotique est un microorganisme non pathogène ayant des effets bénéfiques pour la santé. Les probiotiques sont donc très intéressants, et l’insertion de davantage de produits fermentés dans son alimentation montre des effets positifs sur les fonctions intestinale, immunitaire et indirectement thyroïdienne.
Des compléments alimentaires de probiotiques ont montré des effets bénéfiques dans les maladies auto-immunes de la thyroïde, en complément d’une alimentation anti-inflammatoire et riche en micronutriments. Les bactéries de notre flore intestinale sont capables de fonctionner comme un « réservoir » et de favoriser la conversion de la thyroxine (T4) en triiodothyronine (T3), la forme bioactive des hormones thyroïdiennes. Un microbiote sain permettrait même de stabiliser le traitement pour la pathologie thyroïdienne, comme le Levothyrox, ce qui fait de la nutrition une thérapie adjuvante importante. Il est donc intéressant de travailler sur l’altération de la composition du microbiote, et ça tombe bien, www.atavi.fr est une plateforme étudiée pour t’éduquer à ta santé et devenir plus autonome 😉
La question du gluten
Différence entre la maladie cœliaque et la sensibilité au gluten non cœliaque (SGNC)
La maladie cœliaque est une maladie auto-immune au cours de laquelle la personne déclenche une réponse immunitaire contre la consommation de gluten (fraction gliadine). S’ensuit alors une inflammation et destruction importantes de la muqueuse et paroi intestinales. Des symptômes importants tels que de gros troubles digestifs (diarrhée, météorismes, constipation…), carences nutritionnelles, grande fatigue et perte de poids doivent alerter. En revanche, la SGNC n’est pas une maladie auto-immune, non allergique, mais est tout de même liée au système immunitaire inné. On observe souvent les mêmes symptômes, résolus par l’arrêt du gluten, voire parfois la nécessité de stopper globalement la consommation de céréales.
D’après des études, et selon mon expérience, les problèmes de santé liés au gluten et les problèmes thyroïdiens coexistent presque toujours. La question d’une réaction croisée, par mimétisme moléculaire serait en jeu, ainsi que l’inflammation de l’intestin qui empêche la bonne absorption des micronutriments essentiels à la fonction thyroïdienne.
Micronutriments, thyroïde et système immunitaire
Tous les minéraux, oligo-éléments et vitamines sont très importants pour la santé et doivent absolument être apportés dans l’alimentation. Certains d’entre eux sont particulièrement impliqués dans la fabrication des hormones thyroïdiennes, la gestion de l’inflammation et de la bonne fonction du système immunitaire.
Le fer
Il s’agit d’un élément capital pour la thyroïde. Le fer à la base de la fabrication de nombreuses enzymes, dont la thyroperoxydase qui permet la synthèse des hormones thyroïdiennes. Sa carence peut donc altérer la fonction thyroïdienne dans le sens d’une hypothyroïdie, et ce déficit peut provenir de multiples choses dont une inflammation intestinale. Également, la carence en fer peut contribuer à limiter le transport, la sécrétion et l’utilisation des hormones thyroïdiennes. Il permet aussi une meilleure utilisation de l’iode. Carences en iode et en fer vont souvent de pair et il est régulièrement observé en parallèle une hausse de la TSH et une diminution de la T3 libre chez les personnes concernées par ces déficits.
Attention toutefois, la supplémentation en fer ou en iode n’est pas anodine et devrait être supervisée par un professionnel de santé. Tu peux également en apprendre davantage sur ces éléments grâce au cours d’atavi.fr
En effet, l’iode peut avoir des effets très délétères dans certains problèmes de thyroïde, et le fer peut grandement poser souci pour ceux ayant des troubles digestifs et inflammatoires. Demande toujours l’avis de ton professionnel de santé.
L’iode
Il est bien connu désormais que l’iode est un composant indispensable des hormones thyroïdiennes. Sans iode, la thyroïde ne peut pas fabriquer ses hormones et cela peut conduire à une hypothyroïdie. Le signe clinique le plus évident est le goitre, une augmentation du volume de la glande thyroïdienne. Les nodules thyroïdiens pourraient dans certains cas être aussi la résultante d’un manque d’iode, et des cancers de la thyroïde. Mais son apport excessif a aussi été lié à des nodules et formes de cancer de la thyroïde, ce qui suggère un équilibre complexe entre l’iode et la santé thyroïdienne.
Aussi, l’administration d’iode dans le cadre d’actes médicaux (comme les agents de contraste à très fortes doses) induirait une forte influence sur le microbiote intestinal, en se liant à des acides aminés et en oxydant des composants cellulaires.
D’un autre côté, l’absorption et utilisation de l’iode par la thyroïde peuvent être perturbées par les goitrogènes, qui ont valu une mauvaise réputation à la famille des choux, qui seraient à éviter dans le cadre de pathologies thyroïdiennes. Pour autant, une consommation raisonnable ne devrait pas être problématique. Parmi les goitrogènes connus, notons le thiocyanate et le perchlorate.
Les halogènes tels que le brome, le fluor, le chlore vont aussi inhiber l’absorption de l’iode par la thyroïde.
Le sélénium
Le sélénium est capital à la fois pour la bonne fonction du système immunitaire, mais également pour la glande thyroïdienne et les enzymes responsables de la conversion des hormones thyroïdiennes, appelées désiodases. La glande thyroïdienne est l’organe du corps humain qui concentre le plus de sélénium, et pour une raison bien précise : le sélénium au sein de la glande thyroïdienne est un puissant antioxydant, en participant à la synthèse du glutathion peroxydase et de la thiorédoxine réductase, des enzymes qui protègent du stress oxydatif (radicaux libres produits lors de la synthèse des hormones thyroïdiennes, ou bien au cours de l’attaque auto-immune par les anticorps antithyroïdiens). Bien que de petites quantités soient suffisantes pour le bon fonctionnement de la glande, la carence peut vite survenir, notamment si l’alimentation n’en apporte pas assez, si l’absorption intestinale n’est pas optimale, ou bien s’il existe un très grand stress oxydatif.
Le sélénium semble avoir des effets sur la flore intestinale, en augmentant la diversité du microbiote.
Dans les troubles thyroïdiens, la carence en sélénium est une constatation courante, avec en parallèle une diminution de l’activité hormonale et enzymatique et une conversion périphérique réduite de la T4 en T3. En particulier, chez les personnes atteintes de maladies auto-immunes de la thyroïde (thyroïdite d’Hashimoto et maladie de Basedow), la supplémentation en sélénium permet bien souvent de réduire les niveaux d’anticorps antithyroïdiens, et d’améliorer les symptômes cliniques.
Le zinc
Le zinc est essentiel pour la fonction thyroïdienne et nécessaire pour les enzymes impliquées dans la conversion des hormones thyroïdiennes. L'enzyme superoxyde dismutase contient du zinc, qui est considéré comme un antioxydant. La carence en zinc affecte la glande thyroïde à plusieurs niveaux : la carence en zinc altère la synthèse de la TRH (hormone thyréotrope issue de l’hypothalamus, qui stimule la TSH), mais aussi de la TSH, de la T3 et de la T4. De plus, il influence la liaison de l’hormone T3 aux récepteurs nucléaires et la liaison de ce récepteur à l'ADN. Les mécanismes possibles de la carence en zinc comprennent une absorption gastro-intestinale altérée. C’est l’un des micronutriments les plus difficiles à remonter chez quelqu’un de carencé, il faut donc s’armer de patience et se faire accompagner pour une posologie optimale. La relation entre le zinc et les troubles thyroïdiens semble être réciproque, étant donné que l'hypothyroïdie entraîne une carence en zinc et qu'une supplémentation insuffisante en zinc provoque une hypothyroïdie.
Quant à l’intérêt du zinc pour le système immunitaire, il n’est plus à prouver et cela a largement était mis en lumière lors de crise pandémique de Covid-19.
Vitamine D
La vitamine D, dont l’action biologique est plutôt hormonale, est particulièrement connue pour ses effets positifs sur le système immunitaire et les maladies auto-immunes. Grâce à ses effets immunomodulateurs, le calcitriol (forme biologiquement active de la vitamine D) préviendrait l’auto-immunité ou soutiendrait une personne atteinte d’une maladie auto-immune, à travers ses effets immunorégulateurs et tolérogènes, pathologies thyroïdiennes comprises. Mais inversement, une hypothyroïdie semble être corrélée à de faibles niveaux de vitamine D, peut-être à cause d’un métabolisme altéré ou d’une moins bonne absorption intestinale.
Cancer de la thyroïde et nodules thyroïdiens
Le microbiote intestinal chez les patients atteints de cancer de la thyroïde et de nodules thyroïdiens présente une richesse microbienne plus élevée et une composition distincte par rapport au groupe témoin sain, ce qui indique que le microbiote intestinal est corrélé au cancer de la thyroïde et aux nodules. Des agents pathogènes opportunistes peuvent coloniser les patients souffrant d'une maladie thyroïdienne. Plusieurs études ont démontré que la dysbiose du microbiote pouvait être causée par des processus inflammatoires et divers types de cancer.
Dans le cancer de la thyroïde, l'abondance relative des Clostridiaceae, Neisseria et Streptococcus est significativement plus élevée, tandis que dans les nodules thyroïdiens, Streptococcus et Neisseria ont relativement augmenté par rapport aux groupes témoins sains. Les Clostridiaceae ont apparemment des effets cancérigènes, Streptococcus entraîne un risque plus élevé d'adénomes et de carcinomes, et Neisseria a été associée à des troubles inflammatoires et à des maladies pancréatiques. Compte tenu de la forte prévalence des nodules thyroïdiens et du cancer, ces trois genres pourraient jouer un rôle dans la carcinogenèse thyroïdienne. Cependant, Lactobacillus est significativement diminué dans les groupes de cancer de la thyroïde et de nodules. Ce genre est important pour divers oligo-éléments dans les cellules humaines, tels que le sélénium, qui a des effets antioxydants et protecteurs sur la glande thyroïde, impliquant que le manque de lactobacilles peut provoquer un stress oxydatif plus élevé dans la glande thyroïde. Il convient de noter que l'iodure n'est pas seulement suggéré comme étant un antioxydant, mais aussi un antinéoplasique, un antiprolifératif et un cytotoxique dans le cancer humain. Ainsi, des altérations de l'expression de l'iodure peuvent être associées au développement tumoral d'une manière dépendante du type de cancer.
Conclusion
Il existe de plus en plus de données sur l'existence d'un axe thyroïde-intestin fort. Ce lien est une corrélation peu discutée en consultation, mais pourtant importante et prometteuse pour étudier de nouvelles thérapeutiques pour les maladies affectant la glande thyroïdienne. De plus, il existe une prévalence plus élevée de la coexistence de maladies liées à la thyroïde et à l'intestin, tout comme la thyroïdite de Hashimoto - la maladie de Basedow et la sensibilité à la maladie cœliaque et sensibilité non cœliaque au gluten (SNCG). La dysbiose est une constatation courante dans les troubles thyroïdiens. D'une part, elle altère la réponse immunitaire en favorisant l'inflammation et en réduisant la tolérance immunitaire, en endommageant la barrière intestinale et en provoquant une augmentation de la perméabilité intestinale, ce qui entraîne à nouveau non seulement une forte exposition aux antigènes, mais également une inflammation locale. D'autre part, elle peut avoir un impact direct sur les niveaux d'hormones thyroïdiennes par la perturbation de la conversion intestinale de la thyroxine en triiodothyronine. Le microbiote intestinal influence également l'absorption des micronutriments importants pour la thyroïde, notamment l'iode, le sélénium, le zinc et le fer. Tous sont essentiels à la fonction thyroïdienne et il existe un lien clair entre le dysfonctionnement thyroïdien et les niveaux altérés de ces oligoéléments. Par exemple, une carence en iode peut entraîner un goitre, vraisemblablement des nodules thyroïdiens et même un cancer folliculaire de la thyroïde. Un apport élevé en iode peut induire une hypothyroïdie ou une hyperthyroïdie chez les patients sensibles. Le fer est essentiel à la croissance bactérienne, la disponibilité du fer influence la composition du microbiote, et en même temps, le microbiote influence la disponibilité du fer.
Compte tenu des différents effets potentiels du microbiote et des micronutriments sur les fonctions thyroïdiennes et les médicaments, de nouvelles stratégies thérapeutiques de prise en charge des maladies thyroïdiennes pourraient être établies et plus spécifiquement adaptées aux patients, en fonction de leur composition bactérienne intestinale. De futures études humaines suffisamment puissantes seraient nécessaires pour évaluer l'impact du microbiote intestinal sur la fonction et les maladies thyroïdiennes.
Knezevic J, Starchl C, Tmava Berisha A, Amrein K. Thyroid-Gut-Axis: How Does the Microbiota Influence Thyroid Function? Nutrients. 2020 Jun 12;12(6):1769. doi: 10.3390/nu12061769. PMID: 32545596; PMCID: PMC7353203.
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